•  

     Madame X était arrivée dans la journée,

    Et avait très vite compris ce qu’étaient ces « bénévoles » :

    Elle-même avait été bénévole, et même bénévole d’accompagnement,

    Pour une association de lutte contre le cancer.

     

    Le cancer, elle connaissait bien : elle en avait eu un trente années plus tôt,

    Un lymphome dont elle avait guéri.

    Mais récemment, un nouveau cancer était apparu,

    Qui lui avait occasionné une sorte d’étouffement,

    Dont elle avait bien cru ne jamais sortir.

    A la maison médicale, tout était fait pour calmer son angoisse que cela ne reprenne,

    Elle se sentait donc plus en sécurité que chez elle.

    Ce qui la préoccupait, en dehors d’un possible étouffement : une poche d’eau dans le poumon.

    Et puis tous ces médicaments, disait-elle, lui faisaient perdre la mémoire.

    « A mon âge, vous savez, on ne se souvient de rien, et encore plus quand on est malade

    Et quand on vous soigne avec ça ! » (elle me montrait une pompe à morphine).

    « Vous n’êtes pas si âgée que cela ! »

    « J’ai quand même quatre-vingt treize ans… et demi », me dit-elle, fière de m’étonner.

    Et je m’étonnais en effet:

    Le cheveu était encore gris,

    Les rides peu nombreuses….

    Elle me prenait peut-être pour un gamin, et me demanda mon âge,

    Et en profita pour me demander aussi mon métier.

    Je lui dis tout cela.

    Quel ne fût pas mon étonnement, un bon mois après,

    Qu’elle me les redît  sans faute : elle n’oubliait donc pas tant que cela !

     

     

     

    Sur le mur en face de son lit, hormis les photos de ses petits enfants et arrière petits enfants,

     Il y avait une photo d’elle avec son mari, au temps de leur splendeur.

    « C’était un homme délicieux, nous avons passé d’excellentes années ensemble…

    Cela avait commencé quand je n’avais que seize ans.

    Il travaillait avec le mari de ma grande sœur,

    Et je le vis au cours d’un dîner.

    Je compris tout de suite que ce serait lui, et pas un autre.

    A cette époque, avant la guerre de 40, les filles n’avaient pas la liberté qu’elles ont aujourd’hui.

    J’avais perdu mon père quand j’étais en bas âge, et ma mère était bien consciente de ses responsabilités vis à vis de moi.

    La situation aurait pu être bloquée si je n’avais pas eu une grande sœur,

    Qui elle aussi veillait sur moi, mais autrement.

    Je me confiai à elle, elle me LE fit rencontrer.

    Un jour, il demanda la permission de me raccompagner au métro, seul à seule.

    Ma sœur donna sa permission.

    En marchant, il me demanda s’il pouvait correspondre par lettres avec moi.

    J’étais embarrassée, car qu’allait dire ma maman ?

    Ma grande sœur trouva la solution : il y aurait un tiroir chez elle,

    Où je pourrai déposer mes lettres, et récupérer les Siennes. En toute discrétion !

    Nous sommes restés trois ans fiancés de la sorte.

    Il a bien fallu en parler à ma maman, qui donna son accord pour un mariage quand j’aurai dix-huit ans.

    Une date fut fixée, en Septembre 1939.

    Il fallut évidemment reporter cet événement : nous étions victimes, comme tous ceux de notre génération,

    De cette guerre dont nous n’étions pas responsables !

    Mon fiancé avait déjà fait trois ans de service, il lui fallut repartir.

    Heureusement, il était dans l’armée, de l’air,

    Dans des véhicules qui gardaient le contact radio avec les avions.

    Il était donc moins exposé que dans l’infanterie, et ne fut pas prisonnier.

    Nous nous mariâmes en Novembre 40,

    Et attendîmes la libération pour avoir notre premier enfant, une fille,

    Suivie par un garçon sept ans après.

    Je me souviens que mon patron, à l’annonce de la naissance prochaine de mon aînée,

    Fit une moue, qui voulait dire qu’il fallait que je prenne mon travail plus au sérieux.

    Mais quinze jours plus tard, il eut l’humour de me convoquer dans sa cage de verre,

    Pour m’annoncer que sa fille allait le faire grand-père…

    Avec mon mari, qui était technicien en téléphonie pour des grosses sociétés,

    Nous savions que nous étions heureux ensemble,

    Et n’avions pas besoin de nous le dire pour en être surs.

    Et puis mon premier cancer est arrivé.

    Là, je me suis battue, car il me semblait impensable de disparaître avant d’être grand-mère. En effet, mes frères et sœurs ont tous des petits-enfants, et je ne aimais pas l’idée d’être la seule à n’en pas avoir.

    Alors que la guérison était en vue, mon fils me dit un jour qu’il avait quelque-chose à me dire.

    Il me fit asseoir sur un banc et m’annonça l’événement que je désirai au plus haut point.

    Il ne pouvait pas me faire plus plaisir !

    Ma petite fille naquit, et les circonstances de la vie ont fait que je m’en suis beaucoup occupée. Elle a fait des études de psychologie.

    Tenez, regardez les photos, c’est elle avec son enfant car je suis arrière-grand-mère ! »

     

    Ce soir là, Madame X avait encore beaucoup de choses à dire,

    Mais il me fallait penser à aller voir d’autres malades.

    De toute façon, il y aurait d’autres bénévoles le lendemain,

    Et elle me dit que je n’étais pas le seul à qui elle parlait de sa vie,

    Ce qui ne m’étonna pas : nous sommes et devons être interchangeables.

     

    Le jeudi suivant, je la trouvais prostrée : ce qu’elle craignait, une insuffisance respiratoire, était arrivé…

     

     


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  •  

     

    Madame X et moi, nous nous sommes vus plusieurs Jeudis de suite. Comme elle

    fume, je l’accompagnais au fumoir ou dehors, et là, nous parlions.

     

    C’est une personne de grande taille, avec des lunettes qui agrandissent ses

    yeux, un beau regard franc, qui accepte l’amitié que je lui propose. Un tout

    petit reste d’accent Suisse, et une douceur dans le ton qui me rappelle

    quelque-chose, mais quoi ?

     

    « Eh oui, je n’ai pas réussi à m’arrêter de fumer ! Cela doit d’ailleurs être la cause

    de ma maladie… »

     

    Je lui fais remarquer qu’on ne peut pas dire qu’une personne a « le cancer du

    fumeur », la seule chose dont on est sûr, c’est que fumer est mauvais pour la

    santé.

     

    Elle est très au courant de l’évolution de sa maladie, et de son issue fatale.

    Pourtant, le médecin qui la lui a apprise a manqué de douceur :

     

     « Je ne peux plus rien pour vous, vous en avez pour environ trois mois , m’a-t-il

    averti, et c’était il y a deux ans. Il est vrai que j’avais bien dit que je ne voulais

    pas qu’on s’acharne sur moi, que je voulais regarder la réalité en face, mais

    quand même ! »

     

    « Vous savez c’est très difficile d’annoncer ce genre de choses. Les médecins,

    au moins ceux d’ici, font ce qu’ils peuvent... »

     

     Finalement, cela ne lui fait pas peur, surtout qu’elle fait pleine confiance à

    l’équipe médicale pour l’empêcher de trop souffrir. Elle se sent très bien dans

    la maison médicale : les soignants sont toujours souriants et gentils, elle ne

    souffre pas, elle n’a pas besoin de s’occuper de ses médicaments, tout cela lui

    arrive sans qu’elle ait à s’en soucier ! Quand elle était chez elle, c’était la

    catastrophe : elle passait son temps à se demander si oui ou non elle avait bien

    pris ses pillules, elle souffrait de solitude, elle ne parlait plus, mangeait à peine.

     

    « Ici, le moment que je préfère c’est le matin. Je vais toute seule au

    fumoir, et là, en fumant ma première cigarette, j’écoute les petits oiseaux

    chanter sur les arbres alentour. Cela m’émeut tellement que parfois je pleure,

    je pleure, sans pouvoir m’arrêter ! »

     

    « Et pourquoi pleurez vous ? »

     

    « Parce qu’il va falloir quitter tout cela, quand le Patron l’aura décidé ! » (geste

    en direction du ciel).

     

    Donc : les sensations esthétiques sont plus fortes chez les personnes en fin de

    vie. Ce n’est pas une nouveauté, mais une vérification.

     

    « Et dormez-vous bien ? »

     

    « Oui, le soir je me dis que peut-être je ne serai plus là le lendemain matin,

    mais cela ne me fait pas peur. J’aimerais bien mourir pendant mon sommeil ».

     

    Elle a annoncé la nouvelle de sa maladie incurable à ses trois enfants (adultes),

    de façon que sa mort ne les prenne par surprise.

     

    Je remarque ses ongles impeccables, d’un rouge camélia.

     

    « Oui, vous savez quand on fait des chimios, les ongles noircissent, et il faut

    réagir. Le bouche à oreille fonctionne bien, et les copines ont de bonnes 

    recettes : il faut d’abord passer une  couche de vernis dont le but est de

    soigner, puis  compléter avec le vernis chic. Mais ce qui m’ennuie pour le

    moment, ce sont mes yeux : mes lunettes ne me suffisent plus, et je n’arrive

    pas à lire ce petit livre qu’on m’a donné. »

     

    Je lui proposai mes lunettes de presbyte : « Oui, c’est peut-être mieux » . Je lui

    proposai alors de faire des essais de lunettes avec ce que nous avons recueilli

    chez les bénévoles. J’allais chercher trois paires qui me convenaient,

    plus une loupe. Mais finalement cela n’améliorait pas, elle se plaignait de

    tremblements, peut-être dus à son traitement.

     

    Madame X me confie qu’elle n’a pas toujours été heureuse en ménage. Son

    mari était un haut fonctionnaire international. Le mariage s’est terminé par un

    divorce après trente quatre ans de vie commune. Cela l’a fait énormément

    souffrir, elle est tombée en dépression, a fait une tentative de suicide, avant un

    court passage par Sainte-Anne. Elle a fini par en sortir, il fallait bien ! (Son mari

    est maintenant décédé.)

     

    Quand elle regarde sa vie, elle constate qu’elle n’a pas souvent trouvé

    l’amour, le vrai, celui qui vous donne l’impression d’avoir réussi sa vie. Elle

    aimait son mari, mais elle n’est pas sure de la réciproque.

     

    Pourtant si, elle a connu une personne qui l’aimait « gratuitement », c’est à

    dire sans que ce soit un devoir : son grand-père maternel (du côté de

    son père, les grand-parents étaient agriculteurs, et trop stricts, il fallait marcher

    droit, sinon….). C’était un homme très bon, de condition modeste : il était chef

    de gare dans un petit patelin, et élevait des vaches en parallèle ; tout le

    monde le connaissait, et elle lui avait décerné un surnom, comme font les

    enfants quand ils apprennent à parler : « pabotte », un concentré de

    grand-papa et de Ambotte, le village où il vivait. Elle se souvient encore d’avoir

    passé quelques moments, à l’age de cinq ans, assise dans le lit de ses

    grand-parents, en suçant un bonbon : cette image lui est restée comme le

    symbole du bonheur. C’est peut être là aussi qu’elle a pris de goût de

    travailler la terre de son jardin; elle se souvient qu’elle adorait  toucher

    les vers de terre, goût qui lui est complètement passé ensuite !

     

    Ah, ça y est, cette douceur dans le ton, n’est ce pas celui d’une enfant qui

    parle à des grandes personnes qu’elle sait bienveillantes, dont elle sait

    qu’elle obtiendra ce qu’elle veut en y mettant les formes ? Madame X ne

    serait-elle pas restée un peu cette petite fille qui aimait tant son grand-père ?

    Et jouerais-je le rôle de la personne bienveillante ?

     

     C’était donc un excellent départ dans la vie. Malheureusement, cet homme

    si bon mourut bientôt. Avec sa grand-mère, c’était bien aussi, mais pas pareil !

     

    Nous avons parlé de ces années quarante et cinquante, où nous, les enfants,

    étions timides, car n’avions pas souvent la parole ; nous devions « respecter » les

    grandes personnes, mais celles ci n’étaient pas obligées de nous aimer.

    D’ailleurs, parlait-on d’amour, en dehors des églises ? Et encore, dans les églises,

    on parlait bien plus de souffrance que d’amour ! Dans les familles, on mettait

    plutôt en premier l’obéissance !

     

    « Et vos parents, vous n’en parlez pas… »

     

    « Nuls ! »

     

    « Ah tiens ! pourquoi ? »

     

    « Mon papa avait des gestes déplacés avec moi, et je ne pouvais en parler à

    personne, surtout pas à ma mère, si bien que je devais refouler tout cela en moi.

    J’avais trois grands frères, et tout le monde disait que j’étais la préférée…

    J’avais enfoui tout cela dans ma mémoire, jusqu’ à ce que j’écoute à la radio,

    passée la soixantaine, Carole Bouquet parler des dangers que courent les

    enfants… Cela m’a ouvert les yeux et j’ai compris que, finalement, je n’avais

    pas eu de bonnes bases pour démarrer ma vie. Peut-être est ce pour cela

    que je n’ai pas été heureuse en ménage ? »

     

    « Vous savez, quand on se marie, on ne peut pas souvent deviner les « vices cachés » du conjoint, on est tellement à la joie de pouvoir réaliser une famille ! Tenez, moi, je ne m’étais pas douté que…. » 

     

    Et je lui racontais les défauts familiaux que j’avais trouvés dans ma belle famille,

    qui ne m’étaient pas apparus au moment du mariage (dans ma famille, il y a

    aussi des défauts, comme partout).

     

    De retour dans sa chambre j’avisais des dessins pleins de tendresse sur le mur.

    Des coloriages où l’on s’était bien appliqué à ne pas dépasser !

     

    « Ce sont vos petits-enfants ?»

     

    « Oui j’en ai huit, quatre garçons et quatre filles. Quel bonheur ! Pouvoir les

    aimer sans avoir à les éduquer.. »

     

    L’un des dessins était fait sur une page comportant des questions sur la

    destinataire (Madame X en l’occurrence), en caractères d’imprimerie : Nom,

    Loisir préféré. Et la petite fille de dix ans avait écrit, avec son écriture enfantine :

    pour le nom, Mamie, et pour le loisir préféré, Aimer ses petites filles ! (elle

    apprendra plus tard qu’aimer n’est pas un loisir, mais c’était vraiment charmant).

     

    Nous échangeâmes encore quelques propos sur les « cadeaux du ciel » que

    représentent ces chérubins.

     

     

     

    Nous nous sommes revus plusieurs soirs des mois de Mai et Juin, quand elle

    ne dormait pas. Je lui proposais toujours de l’emmener au jardin, et nous

    admirâmes ensemble les pivoines, qui laissèrent ensuite la place aux roses et

    aux hortensias. Dans le ciel passaient en hauteur des escadrilles d’hirondelles,

    avec des cris aigus, tous sur la même note. Nous communiions dans la beauté de

    la nature… C’est bien vrai que les bénévoles reçoivent au moins autant qu’ils

    donnent !

     

     

     

    Eh puis, il fut temps pour moi de m’occuper de mes petits enfants….     

     

     

     

    Ce qu’il y a d’émouvant dans le bilan que tire Madame X de sa vie, c’est que

    l’amour est premier. L’amour « gratuit », qu’elle n’a pas toujours trouvé sur son

    chemin.

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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  •  

    Les soignants l’ont installé sur le dos,

    Mains posées sur le drap,

    Dossier légèrement relevé,

    Et porte grande ouverte.

     

    Il aspire bruyamment par la bouche,

    Ses yeux sont fixes, mais il ne peut fixer,

    Entend-il les mots que je lui dis ? Non, probablement.

    La trachée râcle, souffre-t-il ?

     

    La respiration s’arrête, est-ce fini ?

    Mais non, cela reprend, il reste un fond de vie !

    Je glisse ma main sous sa main,

    Peut-être sent il mieux ainsi ma présence,

    Qu’il n’est pas seul au bout de son chemin.

     

    Je le regarde dans les yeux,

    Même s’il ne me voit pas,

    Guettant un signe de sa part, qui ne viendra sans doute pas.

    Ma main le gêne-t-il ?

     

    Etait-il marié, père, grand-père, célibataire,

    Comment a-t-il passé la guerre,

    Etait-il professeur, ouvrier, fonctionnaire, homme-d’affaires,

    Savait-il aimer, ou n’était-il que haine ?

    Et quelle relation avait-il avec Dieu,

    A l’heure de partir, quel bilan peut-il faire ?

     

    Toutes ces questions,

    J’aime me les poser, même s’il ne peut répondre

    (et s’il pouvait, je ne les poserais pas,)

    C’est ma façon d’être avec lui.

     

    Oh tous ces souvenirs, toute cette expérience, toutes ces sensations

    Qui disparaissent !

    Et combien d’enfants, de petits enfants il laisse ?

     

    On ne m’a pas, cette fois, demandé de l’accompagner jusqu’à sa mort,

    Qui peut arriver maintenant, mais peut-être aussi dans plusieurs jours.

    Je le quitte donc, pour voir d’autres malades,

    Je reviendrai peut-être le visiter plus tard ce soir.

     

     


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  •  

    Je regardais par le hublot, en essayant d’être discret.

    Madame X me fit un sourire, je rentrai.

    Elle me pria de m’asseoir.

    Elle pouvait avoir une soixantaine d’années,

    Et était couchée sur son lit, peu vêtue de linges blancs,

    Elle n’avait pas froid.

     

    Je lui demandai si, arrivée de la veille, elle appréciait la maison.

    Oui, me dit-elle, et la voilà partie sur sa maladie,

    Dont elle me parla avec forces détails, ce qui n’est pas courant.

    « J’ai une maladie très spéciale, une sorte de leucémie.

    Ma moëlle épinière ne fabrique plus de globules blancs et rouges,

    Ni des plaquettes. »

    (Je ne sais si la moëlle épinière fabrique tout cela, mais là n’est pas le point).

    « Il faut souvent me transfuser,

    Mais cela ne suffit pas, je suis très fragile.

    Et depuis quelques temps, j’ai un cancer dans le haut des cuisses,

    Regardez, on m’a mis des pansements serrés… »

    En effet, les hauts de ses deux cuisses étaient couverts de pansements.

    « Je crois que je suis ici pour finir ma vie »

    Dit-elle, mais son ton n’était pas triste.

    « Je crois qu’après la mort, il y a quelque-chose,

    Et je suis tellement heureuse d’avoir la foi !

    Il faut le dire, j’ai la foi du charbonnier !

    J’ai beaucoup d’amies, qui viennent me voir ici,

    Quelques-unes font partie de ma chorale,

    Dans ma paroisse à Versailles.

    Je sens que toutes ces amies prient pour moi,

    Je le ressens comme une force qui me pousse, qui m’encourage ! »

     

    N’étant pas un adepte de la foi du charbonnier,

    J’admirai tout de même la sérénité de cette dame,

    Qui avait un ton que je qualifierais de joyeux,

    Alors qu’elle allait mourir, et le savait !

    Et comment serai-je, moi ?

     

    «Et puis il y a ma sœur, et mes neveux et nièces.

    Nous avons une famille très unie.

    Je ne pourrai pas fêter Noël avec eux,

    Mais il est prévu que je puisse sortir

    Le 28 Décembre, nous nous retrouverons tous au restaurant.

    J’en suis toute heureuse à l’avance ! »

     

    Je la quittai, pour  voir d’autres malades.

    La semaine suivante, j’appris qu’elle était morte le 23 Décembre.

    Je ressentis une fois de plus ce côté implacable, sans pitié, de la mort :

    Elle ne tient pas compte des agenda !

     

     


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  •         

    Mon père était  négociant de vins à Soissons,

    Qui en quatorze fut sous le joug Allemand.

    Il s’enfuit, passant  l ‘Aisne sur le reste de  pont,

    Emmenant avec lui sa femme et deux enfants.

     

    Direction Poitiers. Là-bas, on lui proposa

    Un emploi, mais qui était un peu misérable.

    Aussi jusqu’à Toulouse  continua-t-il.

    Avec succès. C’est alors que sa femme périt.

     

    Il épousa  alors une femm’ de Soissons,

    Qui en mille-neuf cent vingt-huit me mit au monde.

    Ma grand-mère maternelle était « fille mère »,

    Le mariage ayant été refusé par son Père.

     

    La guerre  me priva d’études. Je trouvai

    Mon tout premi-er travail dans la mécanique,

    Puis changeais pour électronique automobile.

     

    De grouillot, je devins chef d’équipe technique,.

    Et terminai ma carrière comme ingénieur.

    Car le travail bi-en fait était mon éthique,

    Et j’avais la confiance de mes supérieurs.

     

    A  mon tour, avec une Picarde, je me mariai,

    Nous avons trois enfants.  Plus que moi je voulais

    Qu’ils étudient, les  aînés ont fait médecine,

    Et la derni-ère est  docteur en pharmacie.

     

    Mon épouse est  secrétaire de direction,

    Elle a secondé longtemps de nombreux ministres,

    C’était à qui la ferait travailler avec lui,

    Elle a  été avec Chirac à Matignon.

     

    Cet après-midi, j’ai remarché. C’est curieux

    Je ne sais pas du tout si j’en suis très heureux,

    Mais je vais mieux pouvoir aider mon épouse,

    Elle qui s’est tant occupée de moi, si douce !

     

    Je suis grand père de nombreuses fois, quell’joie,

    Et même arri-ère grand père, quatre fois.

     

    J’ai une passion pour l’histoire militaire,

    Cela me vi-ent peut-être de mon grand père.

    Je suis presque incollable sur la grande guerre,

    Et suis spécialiste du vingti-ème siècle.

     

    Ca me fait plaisir de vous dire tous ces faits,

    Et je vous remercie, bénévoles, qui me dites

    Que ma vie fut réussie. Vraiment, je n’ai fait

    Que ce que j’ai pu, mais sans jamais me trahir.

     

     

     


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  •  

    Ce qui frappe en entrant dans la chambre de Monsieur X est la beauté de son visage. Pas un gramme de trop, un air serein, digne. On sent une « pointure », qui pourrait se permettre une certaine propension à « faire la morale ». La voix est posée, avec un accent modéré du midi (il est d’Uzès, près de Nîmes, me dira-t-il, le premier duché de France !), le regard franc bien que souvent détourné  pour la recherche du mot juste.

     

    « Vous savez, je suis venu ici pour mourir. C’est dans l’ordre des choses, vu que j’ai quatre-vingt-quatorze ans. »

     

    « Et vous souffrez, ou vous avez peur de souffrir ? »

     

    « Non, cela ne me fait pas peur. Mais je vais surement faire souffrir ma femme, mes enfants et petits enfants… »

     

    « Mais ce n’est pas vous qui les ferez souffrir, c’est cette roue qui n’arrête pas de tourner… Mais dites-moi, cela fait longtemps que vous êtes malade ? »

     

    « Oui, ce cancer ne me quitte pas depuis plusieurs années. Au début, il ne me gênait pas,mais il a grandi d’autant plus que j’étais en bonne santé, ce qui peut paraître contradictoire.        Ma bonne santé en fait lui profitait aussi. Longtemps il s’est tenu à distance. Pourtant, il y a un an environ, j’ai senti une gêne, j’ai été voir le médecin, un certain docteur YYY, que je vous recommande vivement, j’ai fait les analyses, et je suis retourné le voir. J’ai tout de suite vu sur son visage que les nouvelles n’étaient pas bonnes. Pour le mettre à l’aise, j’ai tourné ma  question de façon que la réponse soit dans la question : « Alors, la faculté a de mauvaises nouvelles à m’annoncer ? » Il n’eut qu’à acquiescer… 

     

    C’est ce qu’on appelle de la délicatesse !

     

    Ayant eu déjà des entretiens avec cet homme dans un précédent séjour qu’il fit ici, je lui montrai que je n’avais pas oublié ce qu’il m’avait raconté sur ses activités dans les organisations viticoles. Il fut très heureux de me raconter de nouveau toute sa belle carrière.Tellement heureux que sa voix se fit plus forte et que je fus obligé d’aller fermer la porte pour ne pas importuner les voisins.

     Il m’expliqua tous les progrès auxquels il avait assisté, et qu’il avait favorisés par la création  d’une école de vinification : les fûts désormais en inox, la température de fermentation contrôlée en permanence, l’amateurisme à jamais banni (« on va vinifier comme le voisin de tonton Jules, qui sait y faire ! »), d’un autre côté les relations avec le ministre de l’agriculture pour éviter la surproduction, la distillation des surplus qui remplissent les cuves des producteurs d’alcool pur, d’ailleurs de bien meilleure qualité quand il est de source agricole que de source industrielle. Cet alcool sert aussi à produire de la poudre à canon depuis la création, en pleine guerre de 14, de la Régie de l’Alcool. Enfin, en une génération, la consommation de vin a diminué d’un facteur 2 en quantité, mais a doublé en qualité, si bien que le revenu du au vin  n’a pas beaucoup changé ; il est toujours égal au revenu de toutes les autres activités agricoles !

     

    Bref une vie réussie chez cet homme que la guerre avait empêché de faire les études auxquelles il aurait dû être destiné ! Il avait été mobilisé le 10 Juin 40, s’était vite retrouvé dans les chantiers de Jeunesse du Maréchal Pétain (bien organisés selon lui), puis, pour échapper au Service du Travail Obligatoire (en Allemagne), était entré dans la résistance, où il  s’occupait de réceptionner les pilotes Anglo-Américains atterris de nuit sur le plateau du Larzac. Là, il avait connu un homme plus âgé que lui, qui avait pu constater ses grandes qualités humaines, et l’avait, après la guerre, fait engager à Paris, dans un grand syndicat viticole…..

     

    Je sortis de cette chambre en me disant que j’avais appris des choses, et que, décidément, la droiture avait du bon !

     


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  • Madame X, après m’avoir beaucoup raconté de sa vie mouvementée,

    M’a dit qu’elle devrait écrire ses mémoires. Je lui ai proposé d’être sa « plume »

    Ce qu’elle a accepté avec enthousiasme. Je me risque donc, dans ce qui suit,

    A raconter sa vie, en me mettant à sa place, à la première personne.

     

    « Commençons par mon grand-père. C’était un ingénieur colonial

     Qui bâtissait, à la fin du 19ème, des routes et des ponts dans le Yunnan,

     Province aux confins de la Chine et du Viet-Nam.

     

    Ma grand-mère lui avait donné trois filles,

    Mais, comme souvent à cette époque, elle mourut encore jeune.

    Que faire quand on est très occupé et qu’on a trois filles à marier ?

     

    La problème de la première fut vite et bien réglé :

    Beau mariage, belle situation,

    Elle disparut dans une océan d’opulence et de réussite,

    Ne s’occupant guère de sa famille.

     

    La seconde, ma mère, et la troisième, étaient surtout intéressées

    Par des « croisières » entre le Viet-Nam et la France.

    Il y avait sur les bateaux une excellente ambiance,

    Et les rencontres qu’on y faisait étaient de qualité.

     

    Mais mon grand-père finit par en avoir assez

    De payer des traversées sans résultat tangible,

    Et leur demanda de faire enfin des études

    A Paris. Ma mère s’inscrivit dans une école d’infirmière.

     

    Elle rencontra un homme, un brave ingénieur,

    Qui lui fit un enfant, moi. Il ‘régularisa’, comme on disait alors,

    Mais eut l’impression qu’on lui avait forcé la main,

    Cependant il était vraiment très gentil

     

    Et me voilà arrivée, après seulement huit mois de grossesse.

    J’eus bientôt une petite sœur.

    Mon enfance fut tumultueuse,

    Auprès d’un père légèrement absent,

    Et d’une mère qui brûlait ses plats,

    De telle sorte que manger m’est devenu à jamais désagréable.

     

    Ma mère me préférait à ma sœur,

    Et j’en profitais, chipie que j’étais,

    Pour l’écraser, ce qui me laisse bien des regrets.

    Avec elle, j’ai l’impression d’avoir tout râté,

    Mais il paraît qu’il est commun, à mon âge, d’avoir cette impression.

     

     

    Quand j’eus dix-huit ans, je tombai follement amoureuse

    D’un peintre célèbre, qu’on appellera ici Antoine,

    Qui aimait entre autres Bernard Buffet,

    Bien que ses œuvres n’aient que peu à voir avec celles de ce dernier.

     

    Une telle passion, il faut l’avoir vécue.

    Mais maintenant, je pense qu’en fait j’ai été une victime,

    Victime de cet Antoine qui ne pensait qu’à lui.

     

    Le hic, c’est qu’il était marié.

    Qu’à cela ne tienne, il osa venir

    Demander ma main à mon père,

    Qui lui fit remarquer l’alliance qu’il portait au doigt.

     

    Antoine lui répondit qu’il divorcerait,

    Mais mon père dit non, tout net.

    Restait alors à Antoine à m’enlever.

     

    Un jour que j’étais dans la rue,

    Un homme m’aborda devant mon domicile

    Et ma convainquit d’entrer dans sa voiture,

    Ce que je finis par faire.

     

    Je me tournais vers l’homme qui était au volant,

    Et reconnus, déguisé, Antoine….

    Qui m’emmena vers Caen, dans une maison de sa famille,

    Où, je me souviens, il y avait des poules

    J’étais enceinte et avais très peur de l’accouchement,

    Et encore plus d’accoucher là-bas.

    Mes parents me firent rechercher, et je rentrai à la maison

    Où naquit de ma petite Caroline.

     

    Antoine avait des tableaux à vendre

    Et avait trouvé un acheteur Anglais.

    Je lui proposai d’aller à Londres faire l’affaire,

    Mais j’appris qu’on ne pouvait vendre des tableaux Français à l’étranger.

     

     

    Et, comme dans la chanson,

    La vie sépare ceux qui s’aiment.

    Antoine partit un jour avec une très jolie femme,

    Qu’il avait rencontrée dans la rue….

     

    Malgré tout, comme j’aimais la peinture, j’ai, petit à petit,

    Largement dépassé le niveau de peintre amateur,

    Je vends parfois des tableaux,

    Cela, je le dois à Antoine.

     

    Ma qualité première, si j’en ai une, est la curiosité.

    J’ai toujours adoré les voyages,

    Mention spéciale à l’Italie,

    Et dans un autre ordre d’idées, les études.

     

    J’ai commencé comme institutrice, et,

    Après avoir passé des diplômes,

    J’ai réussi à devenir professeur

    Dans le secondaire.

     

    J’ai eu plusieurs maris successifs,

    Mais ma grande réussite, c’est Caroline,

    Qui a toutes les qualités,

    Belle, intelligente, gentille….

     

    Pourtant, ce n’est pas vraiment moi qui l’ai élevée.

    Ce sont plutôt mes parents,

    Trop contents d’avoir une telle perle dans la lignée.

    Pourtant, je peux dire qu’avec Caroline, j’ai beaucoup de connivence.

     

    Et me voilà, soignant un cancer

    Qui m’a atteinte il y a dix ans et dont je me croyais guérie.

    Pour comble de malheur, ma petite sœur souffre de la même maladie,

    Elle est soignée dans une clinique à Saint-Raphaël. »

     


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  • Il faisait encore chaud en ce début de soirée.

    Vous fixiez le mur en face de votre lit, et éleviez doucement vos mains, puis les rabaissiez. Je frappai à votre porte. Vous ne pouviez répondre, mais votre main gauche m’a fait signe d’entrer.

    Vous n’étiez pas bien âgée, tout au plus cinquante ans.

    Nous sommes restés un moment yeux dans les yeux. Vous aviez des yeux noirs, et votre regard indiquait que vous étiez bien présente. J’avais compris que vous ne pouviez pas parler facilement, et je ne voulais pas vous fatiguer. Peut-être qu’une simple présence suffirait ?

    Au bout d’un moment, vous avez porté votre main droite à votre front, puis sur votre sternum, puis sur l’épaule gauche, puis…. Ca y’est j’avais compris, vous me signifiiez que vous vouliez prier.

    Pour clarifier la situation, je vous affirmai que je n’étais pas un prêtre. Cela n’a pas eu l’air de vous intéresser.

    Il n’est pas dans mes attributions de « faire prier » les malades, pour cela il y a les bénévoles d’aumônerie. Mais un bénévole se doit toujours d’essayer de répondre au désir du malade.

    J’hésitai. Je ne me voyais pas réciter des « Pater » et des « Ave » à la chaîne. Après quelques instants, je vous proposai de lire des psaumes à haute voix, l’expérience montre qu’ils ont, s’ils sont bien choisis, un effet apaisant. Vous me fîtes un signe d ‘acquiescement, et j’allai chercher une Bible.

    Je lis un premier psaume, le 23(24) « Le Seigneur est mon berger »,  qui est rassurant, bien qu’il parle aussi de la mort. Vous écoutiez, sans rien manifester, mais vous étiez visiblement présente. Je vous en proposai un second, puis un troisième.

    Ensuite, vous avez remis votre main droite sur votre front, puis sur le sternum, puis…. La prière était finie.

    Je vous ai proposé de vous signaler à l’aumônerie. Vous avez dit tout bas quelque chose. J’ai approché mon oreille : « Je ne peux pas parler ». Je vous dis alors qu’il y avait aussi la possibilité de sacrements… Visiblement il ne fallait pas insister. Il fallait même quitter la chambre pour vous laisser vous reposer, avec un grand merci.

     Cette me rappelait la prière du soir quand j’étais petit


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  •  

     

    Ce soir là, alors que je marchais dans le couloir, Madame X, sa porte étant grande-ouverte, me vit de loin et nous manifestâmes tous deux un certain intérêt pour l’autre.

    -« Vous tombez bien, j’avais quelque chose à vous montrer et à vous demander ».

    Elle sortit de son sac une image et une photo. La photo représentait son petit chien, qui avait un regard futé. L’image représentait Sainte Rita à genoux devant une statue de la Vierge ; un rayon lumineux blanc reliait Rita à la statue. Du plus pur style Sulpicien. Au dos de cette image figurait la « prière de Sainte Rita », que je lus lentement à haute voix. Il y était question d’intercession auprès de Dieu, d’amendements, de péchés…

    -« Il paraît qu’il y a une Eglise ici ? ». (Elle était arrivée la veille et ne connaissait pas encore bien les lieux).

    -« Oui, enfin, une chapelle ! ».

    -« J’aimerais beaucoup y aller ».

    -« Qu’à cela ne tienne, je peux vous y emmener  maintenant ».

    -« C’est que, je suis fatiguée ce soir… Demain ce serait mieux ».

    Je me permis d’insister, de l’aider à aller au bout de ce désir pas très bien affirmé. Demain serait un autre jour.

    -« Vous savez, je peux vous y emmener dans votre lit, cela ne devrait pas vous fatiguer beaucoup».

    -« Oui, mais les infirmières ne voudront pas… »

    -« Si vous le voulez, je peux aller leur demander ».

    Silence.

    -« Alors, j’y vais ? »

    -« Si vous voulez ».

    J’allais donc demander la permission, qui fut accordée, et l’infirmière m’aida même à sortir le lit de la chambre et à l’amener jusqu’à l’ascenseur, preuve qu’elle approuvait ce déplacement.

    Nous traversâmes le rez-de-chaussée qui était en réfection cet été là, et je lui fis  remarquer que toutes ces bâches sur les meubles, cela faisait un peu fantômes. Il valait mieux l’exprimer, pour éviter les fantasmes…

    Arrivés dans la chapelle, je lui donnais le choix entre la statue de la Vierge, et le Christ en croix. Elle choisit la statue de la Vierge, voulut mettre deux cierges, l’un pour son mari, mort il y a trente ans, l’autre pour une amie. Elle trouva dans son sac cinq euros, que je mis dans la boîte aux lettres de l ‘aumônerie. Puis, par discrétion, je la laissai seule avec ses prières, et m’éloignai un peu.

    Mais elle me rappela :

    -« Je ne sais pas prier ! »

    Imprévu !

     Je m’approchai, lui demandai de retrouver dans son sac la prière de Sainte Rita, que je relus lentement. Tout à ma lecture, j’entendis un sanglot, puis un second. La lecture prit fin, et je lui proposai de réciter ensemble un Je vous salue Marie. Je disais lentement les phrases, qu’elle répétait ensuite. Puis, à sa demande, nous prîmes le chemin du retour.

    Elle m’expliqua, pendant que poussais son lit, qu’elle n’avait jamais été baptisée, que son père, qui était mort à vingt-sept ans d’un problème cardiaque consécutif à une crise d’asthme, n’avait jamais voulu qu’elle le soit. Je lui proposai de la signaler à l’aumônerie, et elle accepta volontiers.

     

     

     

    En y réfléchissant, le lendemain matin, si, à mon avis, tout dans les religions peut être contesté Historiquement, le désir d’une relation avec plus Haut que nous est ancré profondément en nous. Même une vie entière à nier ce désir n’arrive pas à le détruire.

     

    Merci Madame, j’ai appris quelque chose avec vous !

     

     


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  • Il avait été G.O. au club med,

     

    Ensuite, l’âge venant, avait  sombré.

     

    Il fumait des gitanes à la chaîne,

     

    Sachant très bien où cela l’emmenait.

     

     

    Il écrivait sur un carnet bleu pâle

    Des « aphorismes » qu’il publi-erait.

    Cela serait sa part d’éternité.

    Voici celui que j’ai dans ma mémoire :

     

    "Il avait tellement picolé,

    Que son cercueil en avait la gueule de bois ».

     

    Il n’est pas permis de divulguer des noms,

    Si je le fais c’est qu’ il l’aurait aimé,

    C’est pour une once de célébrité,

    Après sa vie qui était bi-en sombre.

     

    Il s’appelait Marc Lavaut.

     


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  • Vous étiez alitée, et je vous regardais

    Discrètement à travers votre porte ouverte,

    En me souriant  vous avez tourné la tête,

    Alors dans votre chambre j’ai osé rentrer,

    Dans mes petits souliers, 

     

    L’odeur dans votre chambre était plus que chargée,

    Vous étiez à l’oxygène, à l’eau gélifiée,

    Vous respiriez très mal, vous étiez sous morphine,

    Un large pansement barrait votre poitrine,

    D’où le mal venait.

     

     

    Vous étiez tombée malade un dimanche en Mai,

    Les pivoines poussaient, les oiseaux gazouillaient,

    La veille vous aviez nagé dans un étang

    Avec votre tribu, puis donné le goûter

    A vos petits enfants.

     

    Ce jour là, vous avez senti un agrégat,

    Vous avez consulté chez votre médecin,

    Chimio thérapie, Curie, rechimio, Cochin, 

    Vous savez, les docteurs ne sont pas agréables,

    Il ne disent rien.

     

    -« Et je suis maintenant après six mois d’arrêt,

    Dans cette maison médicale, où, il paraît,

    Il y a beaucoup de gens qui seraient perdus,

    «C’est vrai cela ? » -« Plus ou moins » ai je répondu,

    Vous avez changé de sujet.

     

    Vous espéri-ez très bientôt sortir d’ici,

    Il était inutile de vous contredire !

    Et votre mari, qui ne venait pas vous voir !

    Alors que je l’avais croisé dans le couloir,

    Il avait piètre mine.

     

    Vous vous inquiétiez d’un repas à préparer

    D’urgence et me preniez pour le cuisini-er,

    Je vous demandai si vous aimiez recevoir,

    Il le fallait, les relations à cultiver,

    C’était obligatoire.

     

    Et vous m’avez parlé de votre nouveau curé,

    Un homme jovial et de bonne volonté,

    Puis vous m’avez demandé de vous confesser,

    Alors là j’ai dû doucement vous recadrer.

    -« Ah bon, je croyais ! »

     

    Avisant  un psautier posé sur votre table,

    Je vous proposai d’en lire un morceau choisi,

    Et la divine parole son effet fit,

    Elle vous rendit petit à petit le calme,

    Vous vous êt’ endormie.

     

    Alors je suis sorti sur la pointe des pieds,

    Ma mission auprès de vous était terminée,

    J’y penserais plus tard, au petit déjeuner.

     

           


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  •  Cette dame, que j’avais vue quinze jours avant,

    Avait sonné, je frappai, entrai dans sa chambre.

    « J’ai trop chaud, pouvez-vous me fermer les volets

    Et m’ouvrir un peu la fenêtre ? ». Ce que j’ai fait.

     

    « Cela va comme ça ? …Comment va le moral? »

    « Je sais que je vais mourir, ce n’est pas un drame,

    Et ici je suis très bien,  mieux qu’à l’hôpital. 

    Pas de presse, de l’attention, je ne souffre pas. »

     

    « C’est vrai qu’à l’hôpital, ils n’ont guère de temps,

    Ils prennent la tension,  analysent le sang…. »

    « Ici je peux déjeuner quand je le désire,

    Et on ne me fait rien sans avant m’avertir … »

     

    « Vous savez Monsieur, je me sentais très bi-en,

    On me disait belle, malgré mon âge certain,

    Et tout à coup, crac, cela vous tombe dessus,

    On a beau philosopher, c’est quand même dur ! »

     

    Je connaissais son parcours dans l’horlogerie:

     « Oui, mais vous votre vie a été très réussie »

    « C’est vrai, j’ai fait une acceptable carri-ère,

    J’étais commerciale chez Lip, Kelton, Timex,

     

    Je tiens de mon père le goût des beaux objets.

    Cependant je sens que ma mère m’a bridée,

    Que j’aurais pu encore mi-eux réussir

    Elle voulait me ‘mater’,  j’en ai été victime. »

     

    « Tous les parents étaient sévères, c’était l’époque,

    Les enfants n’avaient pas le droit à la parole,  … »

    « C’est vrai. En fait, cela ne m’a pas empêchée

    D’avoir, par réaction, un caractère entier. »

     

    Elle revint au sujet de sa mort prochaine :

    « Je quitterai cette vie sans aucun problème ».

    «Vous avez vécu le miracle de la vie ! ». 

    « Non, je ne pense pas que je puisse le dire ».

     

    Il ne fallait pas en rester là. Je risquai :

    « Pourtant, vous y avez bi-en participé,

    Quand vous avez donné la vie à votre fille ! »

    « Pas du tout, j’étais jeune, j’avais trop de soucis ».

     

    Après un silence, qui me parut long, elle dit : 

    « Et pourtant si, je l’ai vécu, et je le vis,

    Mais c’est avec mon arrière-petite-fille,

    C’est fou cette croissance et ces progrès rapides,

     

    Cette programmati-on des petits humains,

    Qui rampent à huit mois, puis marchent à un an,

    Parlent à deux ans…. Je m’en suis bien occupée,

    Il paraît que cela m’aurait trop fatiguée…»

     

    C’est sur cette note positive que nous nous quittâmes…

     

     

    Le jeudi su-ivant, je frappai à sa porte.

    « Pourriez-vous me remonter un peu le moral ? ».

    «  Je n’en suis pas sûr, mais quel est votre problème ? »

    Après un silence: « J’envisage mes obsèques,

     

    Après une vie somme toute réussie,

    J’aimerais qu’il y ait  tant famille qu’ amis,

    Mais je n’aime pas les grandes cérémonies,

    Où le cœur n’y est pas, où on est hypocrite ».

     

    J’ai du mal à penser à l’après de ma mort,

    Cela m’est  difficile, alors pour quelqu’un d’autre….

    « Vous savez, les enterrements sont souvent simples,

    Et l’ambiance est sincère, recueillie, même humble ! »

     

    « C’était faux pour mon père, mort à soixante années,

    Ma mère versait des larmes de crocodile,

    Bien qu’elle ait été très malhonnête avec lui.

    Mais pourquoi ne l’ai- je pas mieux accompagné? »

     

    « Vous deviez avoir trente ans, c’est  peu pour le faire ».

    « C’est vrai. Je pense aussi au cas de ma grand-mère.

    Après un long séjour en maison de retraite.

    A quatre-vingt onze ans, elle est morte sans aide.

     

    A l’Eglise il y avait peu de monde vraiment,

     Mais c’était son village ! où elle avait vécu! »

    « Oui, mais ses amis devaient avoir disparu,

    Ce n’est pas pareil quand on meurt à cinquante ans ! »

     

    Je lui dis que ses obsèques (j’osai en parler)

    Concernaient presque autant sa fille qu’elle-même,

    Ce à quoi elle acquiesca. « Mais, demanda-t-elle,

    Que fait la maison  pour ceux qui sont décédés ? »

     

    « Il y a un « départ »  pour la mise en bi-ère,

    Qui se fait si on veut avec une prière. »

    « J’aimerais  une prière pour mon départ»

    « Je vais vous faire visiter par l’aumônière. »

     

    Je la quittai plein d’une admiration  discrète,

    C’est beau de garder jusqu’au bout les yeux ouverts !

     « Je ne sais  si mon moral est bien remonté ,

    Mais  nous avons pu discuter et échanger... »

     

    Elle mourut cinq jours après….

     

     


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  •  

    Entretiens de Mme X avec Benoît (bénévole)

    du 5 Janvier et du 19 Janvier 2012.

    Les textes en italiques sont écrits par Benoît,

    Et ceux en caractères normaux par Mme X.

     

    - « Vous êtes née au début de  la dernière guerre,

    le 16 décembe 1939, un Samedi, 18h, à Paris,15eme.

    Vous étions trois enfants , dont un handicapé.

    Votre père pour l’ennemi travaillait,

    étant père de deux enfants (plus une troisième, moi)

    il avait été exempté de front,

    mais pas, en 1943, de travail obligatoire en Allemagne.

    Fut tué par une bombe dans Nuremberg,

     

    Une bombe Américaine à retardement.

    Vous ne l’avez pas connu, c’est peut-être mieux.

    Votre frère qui était dans la Résistance,

    Fut pris, et  tué trois mois après votre père,

    par un inconnu.

    Vous avez eu un beau père, un vi-eux garçon

    Froid, distant, que vous n’aimiez absolument pas.

    Plus tard, il osait poser sur vous des regards

    Qui sur sa vraie nature en disaient vraiment long.

     

    Vous étiez bonne élève, obteniez le premier prix

    Derrière les prix d’excellence et d’honneur. Vous aimiez

    Le chant, le solfège, mais surtout le Français.

    Vous aviez aussi le prix de camaraderie.

     

    Tout vous intéressait, vous adoriez apprendre.

    Ce n’est pas comme les jeunes d’aujourd’hu-i,

    Qui ne savent sans faute écrire une ligne,

    Vraiment il faut les voir ! et aussi les entendre !

     

    Vous ignorez pourquoi vous dormez tout le temps,

    Cela doit être dû à vos médicaments,

    Pourtant je vous n'avez pris qu’un  Doli-prane,

    Vous aviez des douleurs à la langue, aussi au crâne.

     

    Votre mère ne demanda pas une bourse pour vous,

    Dixit le beau-père,

    ( pourtant j’ étais Pupille de la Nati-on

    Orpheline de l’Etat),

    Et décida qu’il vous fallait, à quatorze ans

    Commencer à travailler, et où que ce  soit…

     

    Vous commenciez donc près de la gare de L’Est,

    Un soir, tandis que vous rentrez , une femme tente

     

    De vous convaincre de la suivre dans la cour

    D’un immeuble. Pas folle, vous refusez net.

     

    Ce fut un crève-cœur pendant toute ma vie,

    De ne pouvoir développer mon potentiel.

    De n’avoir pu faire valoir le potentiel de savoir

     que j’avais en moi et qui ne fut pas exploité

    A vingt ans vous tombez très malade : pleurésie,

    Une primo-infection,

    On craignait un’ méningite tuberculeuse.

     

    A cette époque, vous êtes sujette à une amnésie,

    Vous oubliez tout ce que vous avez appris à l’école.

    Etait-ce dù à la maladie ? Après deux mois à Boucicaut,

    Dans un sanatori-um vous en passez six.

    Cétait déjà beaucoup, quand je repense aux premières

     années vécues dans des conditions presque inhumaines

     

    Vous échangi-ez des lettres avec un jeune-homme. ,

    Il pensait mari-age, vous ne dites pas non.

    Vous vous mariai donc, et arriva votre fille

    Qui a bien réussi, c’est tant mieux pour elle. 

     

    Vint alors Mai 68. Comme tout de monde,

    Vous n'avez rien compris, mais cela tournait les têtes.

    J’ai suivi le mouvement et subi des grèves

    de toutes sortes pendant un mois, mais j’ai ressenti

    une sorte d’épanouissement, de liberté que je n’avais

    jamais éprouvés jusque-là. Je commençais

    « à vivre enfin » à presque trente ans.

    Vous aviez vingt-hu-it ans  et étiez plutôt belle,

     Beaucoup de ces photos très bien le montrent.

     

    Dieu, si du moins il existe, commença

    A vous envoyer des mauvais coups : un accident

    De voiture, félure d’une cervicale,

    la première cervicale

    Puis une dépression, quand vous avez quarante ans,

     

    Ensuite, à cinquante ans, vint le chômage,

    (Vous étiez la secrétaire de direction,

    Et organisiez l’activité du patron.)

    Enfin vint cett’ maladie que vous savez fatale.

    Les médecins me l’ont dit. Le mot cancer fait peur,

    A juste titre, et en ce qui me concerne il n’y a

    Aucun espoir de rémission…. Peut-être encore

    un mois (ou deux) avant que je me résigne à être vaincue

     

    Les docteurs manquent souvent de psychologie,

    Ils vous annoncent sèchement votre maladie.

    On vous proposa une atroce chirurgie,

    Sinon vous n'en aviez que pour trois mois, ou six.

     

    Vous avez refusé, et êtes toujours là,

    Mais vous avez peur de souffrir….

    Et de mourir….

    Vous demandant ce que vous avez fait  sur Terre…. »

     

     

    Après un moment, de vous je pris congé,

    Vous m’avez jusqu’à la porte  accompagné,

    Et vous m’avez souri, je ne vais pas l’oublier.

     

    Mais c’était un sourire triste, qui en disait long

    sur les souffrances mentales que j’endure,

    ces angoisses terribles que je ressens,

    ce manque affectif, de bras autour de moi

    qui me consoleraient, qui m’aideraient à supporter

    « tout ça » (et en fait c’est ce mal là qui m’emportera),

    et de l’absence dont j’ai souffert toute ma vie

    en me dispersant un peu trop dans des bras « inutiles »

    qui m’aimaient « mal » et dont je sortais, à chaque

    fois, plus seule qu’avant, et avec un peu plus de rancœur.

     

     


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  •  Cet après midi, sur un banc j’étais assis,

    Quand on m’a demandé de vous accompagner,

    Vos aviez demandé d’appeler un taxi,

    Pour acheter loin d’ici de quoi vous chausser.

     

    Nous vîmes les endroits les plus beaux de Paris,

    « Ah cette tour Eiffel, les Invalides, la Concorde,

    Au pont Alexandre trois il y a trop d’or,

    C’est vraiment dans ces li-eux  que je respire. »

     

    A la Madeleine  nous avons bifurqué

    Dans une petite rue que vous connaissi-ez,

    Nous nous sommes arrêtés devant la boutique

    Qui fournit les acteurs, tous les grands du show biz .

     

    Car vous faisiez vraiment partie de cette classe,

    Même si vous ne jouiez que les seconds rôles,

    Er vous savi-ez discerner les bonnes choses,

    Celles réservées à ceux qui ont de la classe..

     

    La serveuse, très patiente, était colombi-enne,

    Vous lui avez fait sortir cinq ou six modèles,

    Avez pris mon avis, je ne savais que dire,

    Mais j’ai approuvé pour le modèle choisi.

     

    Il y avait pourtant un problème de taille,

    Le quarante trois c’était bien, mais il fallait

    Essayer aussi quarante deux et demi,

    Oui, c’était beaucoup mieux, n’est ce pas mon ami?

     

    Nous sommes sortis place de la Madeleine,

    Et là vous avez cru que j’étais un peu speed,

    Pressé de rentrer à la maison au plus vite 

    Mais, je le crois, mon attitude était sereine

     

    « Benoit, il va falloir que vous me compreniez,

    Ici, je vis, ici, je vis ! »Je comprenais,

    Cependant vous aviez  besoin d’un punching ball,

    Et j’assumai, c’était dans le contrat, ce rôle.

     

    Nous avons traversé la rue  pour le retour,

    J’ai proposé mon aide, pour monter un trottoir,

    Surement pas Benoit, je n’ai pas besoin d’aide,

    Mais la marche était haute, alors bon, si, quand même.

     

    Nous somm’ revenus vers la maison médicale,

    Vous m’avez parlé de votre gredin de frère,

    Avec lequel vous ne vous entendi-ez guère,

    Quelquefois, Benoit, 'est comme ça chez les arabes !

     

    Le Jeudi suivant, je suis allé vous voir,

    Dans le jardin, il faisait beau, il y avait des fleurs,

    Vous parliez à Catherine,  et, ce qui m’a bien plu,

    Vous m’avez appelé Benoît, et reconnu.

     

    Vous nous avez parlé d’un projet pour bientôt,

    Des fables de la Fontaine, récitées sur  scène,

    Et vous voilà parti dans Le loup et le Chien,

    Nous éti-ons vraiment aux premi-ères loges.

     

    Vous saviez donner vie à ces êtres canins,

    Le premier gras, l’autre maigre, vous disiez si bien

    Le moment où le loup s’aperçoit de la trace

    Sur le cou du chien de la honteuse laisse !

     

    Le Jeudi suivant…

    Il n’y eut pas de Jeudi suivant.

     

     


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  • La porte de votre chambre était grand-ouverte

    Et vous me regardiez, alors je suis entré.

    Vous m’avez, tout de suite, confié votre détresse :

    « J’ai peur de mourir, et surtout de laisser

                    Mon fils Guy, dix ans. »

     

    C’était justement l’âge où j’ai perdu ma mère.

    Le lui dirai-je, au risque de l’importuner,

    Mais cela pourrait l’aider, de constater

    Qu’on peut survivre, que tout ne serait pas amer

                    Pour son enfant.

     

    -« J’ai perdu ma mère à l’âge qu’a votre fils,

    Et je crois que ce malheur, je l’ai surmonté. »

    Elle me jeta un regard intéressé.

    A ce moment arriva l’infirmier de nuit,

                    Je quittai la chambre.

     

    Ce soir-là, les malades étaient plutôt calmes.

    Un coup de sonnette, l’infirmier vint me chercher.

    -« C’est la dame de tout à l’heure, elle te réclame.»

    Après avoir frappé, chez vous je pénétrai,

                    Timidement.

     

    -« Parlez-moi de vous après la mort de votre mère ».

    Je lui parlai des larmes, qui  peu à peu tarissent,

    De ma blessure enfin devenue cicatrice,

    De mon souvenir, après tant d’années sans elle,

                    Toujours présent,

     

    De la fleur, en Novembre, sur la tombe déposée.

    « Ah bon, mais moi j’ai prévu d’être incinérée !

    Il va falloir qu’on en parle avec mon mari ! »

                    -« Vous ferez ce que vous avez choisi,

                                   C’est sans importance ».

     

                    Sa jambe pendant hors de son lit, elle dit :

    « Vous serait-il possible de la relever ?»        

    Comme si j’étais un membre de sa famille.

    Je le fis, cependant il fallait désormais         

                                   La tenir à distance,

     

                    Je devais n’être rien pour elle, qu’un bénévole.

    -« Et votre père ? » Je lui  dis tout le soin qu’il prit

    De sa marmaille, à vivre pas toujours très drôle.

    -« Je crois qu’il s’occupera bien de Guy,

    Il est très conscient ».

     

    J’osai lui dire que Papa s’était remarié,

    Que  son amour pour ma mère n’avait pas changé

    Qu’elle n’était pas oubliée. Elle en convint,

    Cela était dur d’y penser, mais lui faisait du bien,

                    Certainement.

     

    Je ne lui avais rien dit de très original,

    Simplement raconté une vie très banale,

    Mais que ces faits et sentiments simples

    Puissent prendre chair dans un être humain

    Etait apaisant,

                   

                    Du moins je l’espère…….                

     


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  •  

    Par le hublot, je regardais.

    Assis sur son lit, il tournait le dos à la porte,

    Baissait la tête. Peut-être qu’une visite

    Lui ferait du bien. Je frappai et entrai.

     

    Vous vous êtes retourné.

    -« Vous tombez bien, j’ai des questions pour vous. »

    -« Vous savez je ne suis pas sûr d’y répondre ».

    -« Vous verrez bien, voulez-vous du coca ? »

     

    J’acceptai, il prit dans son frigo

     une grande bouteille en plastique,

    que je proposais de déboucher,

    ce qu’il refusa net, mais en souriant :

     

    -« C’est vrai, je suis condamné à mort  »

    (geste de l’index et du majeur sur la tempe)

    « Mais je suis encore costaud, et si vous voulez,

    Je pourrais vous attaquer à la boxe ».

    (les deux poings serrés, le gauche devant le droit).

     

    Je compris qu’il me fallait à moi aussi de l’humour !

    Il reprit : -« Ce matin j’ai été déculotté »-« Ah bon ! »

    « Oui, vous croyez en Dieu ? » -« Euh… »

    « Moi, je n’y crois pas, je suis Mathématicien,

     

     J’ai lu Laplace et Lavoisier,

    Qui disent que rien ne se perd, rien ne se crée..  »

    -« Oui, et alors ? » . –« Donc nous n’avons pas été créés !!!!! »

    -« Ah ». Silence.

     

    -« Mais ce matin, une jeune femme m’a dit :

    « Oui, mais nous créons en permanence, nous les Humains »

    Je n’y avais pas pensé, et depuis cela m’a bouleversé.

    Vous savez, quand on va mourir, on pense à toute vitesse ».

     

    Il but une gorgée.-« Mais alors, si on crée,

    C’est qu’on est des Dieux, c’est ce que j’ai dit à cette femme. »

    Je répondis :-« D’une certaine manière oui ! ».

    -« Depuis ce temps, je pense encore plus fort ».

     

    -« Je vais peut-être vous dire une grosse connerie ! »

    -« Dites toujours, on verra bien ! ».

    -« Si Dieu existe, c’est lui qui a créé le mal, »

    Petit arrêt, pour voir si j’acquiesçais,

     

    « Et donc si nous sommes des Dieux,

    Nous aussi nous créons du mal, comme Dieu,

    Nous faisons tout comme Dieu,

    Mais n’est-ce pas une grosse connerie ? ».

     

    -« Pas du tout, vous faites avancer le Schmill-blick,

    C’est vrai que nous faisons parfois le Mal,

    Mais dites voir, pourquoi avez-vous été déculotté ? »

    -« C’est cette femme, j’étais tellement sûr avant,

    Elle m’a retourné ! »

     

    Drôle de mot, déculotter !

    Nous nous sommes quittés, il était pressé d’y repenser…

     

     


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  • Vous veniez d’arriver et n’étiez plus jolie,

    Vous n’avi-ez plus que la peau sur les os.

    Mes collègues m’avaient longuement averti,

    Que vous étiez manipulatrice et schizo.

     

    Et c’est vrai qu’à peine entré dans votre chambre,

    Ayant répondu à votre coup de sonnette,

    Vous m’avez demandé de prendre de l’argent

    Au distributeur, chose que je n’ai pas faite.

     

    Ce soir là, vous avi-ez faim, et j’ai été

    Dans les étages pour vous trouver un yaourt

    Aux fruits, je n’ai trouvé que des yaourts nature,

    Alors il vous a fallu vous en contenter.

     

    Vous l’avez mangé avec un peu d’appétit,

    Vous fixi-ez mes yeux comme si mon regard

    Serein et amical, par vos grand yeux hagards,

    Au bout d’un certain temps, vous nourrissait aussi,

    .

    Le Jeudi suivant votre mère était présente,

    Bien contente de me trouver à votre chevet.

    Nous sortîmes dans le couloir sur sa demande,

    Elle décline vite, m’a-t elle confirmé.

     

    Ma fille vivait dans un drame permanent,

    Son père est mort quand elle n’avait que treize ans,

    Elle a été victime d’un viol, je l’ai mise

    Le cœur gros dans un hôpital psychi-atrique..

     

    S’en sont su-ivis des mieux et des rechutes,

    Un copain pas bien frais qu’elle voulait sauver,

    Et moi qui n’arrivais pas à la repêcher,

    Elle m’en a fait voir, je ne luis en veux plus.

     

    Puis elle a sorti une photo de son sac,

    Voyez comme elle était jolie l’année dernière,

    Oui, c’était vrai, vous pouvi-ez en être fière,

     Elle avait bonne mine, c’était presque une star !

     

     

    Nous sommes revenus sur la pointe des pieds,

    Elle dormait maintenant, tranquille et apaisée,

    Vous aviez retrouvé votre petit bébé,

    Et moi une sœur dont je me souvi-endrai.

     


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